Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine
Centre de recherche et de documentation sur les Amériques

Défendre les droits des peuples autochtones d’Amazonie

23 mai 2019, 17h30-19h30

 

Défendre les droits des peuples autochtones d’Amazonie

 

Jeudi 23 mai 2019

17h30-19h30, salle C

Institut des hautes études de l’Amérique latine

28 rue Saint-Guillaume 75007 Paris

 

 

Conférence-exposition avec :

Fiore Longo, chercheuse, anthropologue et directrice de Survival International France et

Lila Akal, photoreporter, anthropologue et chargée de mission sur le terrain en Amazonie

 

Modération :

Léa Lebeaupin, doctorante contractuelle à l'IHEAL-CREDA

 

L’IHEAL-CREDA vous invite à la conférence intitulée “Défendre les droits des peuples autochtones d’Amazonie”. Cet évènement inaugure la sixième édition de la Semaine de l’Amérique latine et des Caraïbes à l’Institut des hautes études de l’Amérique latine. #SALC2019

Fiore Longo, chercheuse, anthropologue et directrice de Survival International France et Lila Akal, photoreporter, anthropologue et chargée de mission sur le terrain en Amazonie présenteront les organisations Survival International et Igapo Project et leur combat pour la défense des droits humains des peuples autochtones d’Amazonie.

Des photographies prises par Lila Akal (Igapo Project), illustrant les problématiques environnementales et les atteintes aux droits des peuples autochtones en Amazonie, seront exposées.

 

Survival International

Qui sommes-nous ?

Survival International est le mouvement mondial pour les droits des peuples autochtones. Nous sommes la seule organisation qui se consacre entièrement à les défendre à travers le monde. Nous les aidons à défendre leurs vies, protéger leurs terres et déterminer leur propre avenir.

Notre vision est celle d'un monde dans lequel les peuples autochtones sont respectés en tant que sociétés contemporaines et leurs droits humains protégés.

Les peuples autochtones ont développé des modes de vie largement autosuffisants et d’une extraordinaire diversité. De nombreux aliments de base et médicaments utilisés en médecine occidentale proviennent de peuples autochtones et ont sauvé des millions de vies. Et pourtant, les peuples autochtones sont présentés comme étant arriérés et primitifs, simplement parce que leurs modes de vie communautaires sont différents. Les sociétés industrialisées les soumettent à la violence génocidaire, à l’esclavage et au racisme dans le but de leur voler leurs terres et leurs ressources et d'exploiter leur force de travail au nom du « progrès » et de la « civilisation ».

Nous luttons pour la survie des peuples autochtones. Nous menons des enquêtes et des campagnes publiques et nous faisons du plaidoyer. Nous empêchons les bûcherons, les chercheurs d'or et les compagnies pétrolières de détruire la terre, la vie et l'avenir des peuples autochtones à travers le monde. Nous faisons pression sur les gouvernements pour qu'ils reconnaissent les droits territoriaux autochtones. Nous documentons et mettons en lumière les atrocités commises contre les autochtones – et agissons pour y mettre un terme.

Nous travaillons en partenariat avec des peuples autochtones afin d'amplifier leurs voix sur la scène internationale et de changer le monde en leur faveur.

Nous offrons aux peuples autochtones une plateforme grâce à laquelle ils peuvent s'adresser au monde. Nous avons célébré plus de 200 victoires depuis 1969, mais notre travail est loin d'être terminé.

Nous n'acceptons aucun financement provenant de gouvernements ou de grandes entreprises : notre intégrité est notre force. Nous dépendons donc entièrement de dons individuels.

Campagnes :

Peuples non contactés

À cheval entre le Pérou, le Brésil, la Bolivie et la Colombie se trouve la Frontière de l’Amazonie isolée, où vit le plus grand nombre de peuples non contactés de la planète. Il s’agit d’une région riche des ressources naturelles. L’exploration pétrolière, les bûcherons, les trafiquants de drogue et les routes qui traversent leurs territoires mettent leur vie en danger.

Les tribus non contactées sont les peuples les plus vulnérables de la planète. Nous en savons très peu à leur sujet mais nous savons qu’il en existe plus de cent dans le monde. Nous savons aussi que des groupes entiers sont anéantis par la violence perpétrée par des intrus, qui volent leurs terres et leurs ressources, et par des maladies telles que la grippe et la rougeole contre lesquelles ils n’ont aucune immunité.

Les peuples non contactés ne sont pas les reliques primitives d’un passé révolu. Ils sont nos contemporains et représentent une part essentielle de la diversité de l’humanité. Là où leurs droits sont respectés, ils continuent à prospérer.

Leur savoir est irremplaçable et s’est développé sur des milliers d’années. Ils sont les meilleurs gardiens de leur environnement. Il est prouvé que les territoires autochtones constituent le meilleur rempart contre la déforestation.

Nous nous opposons aux tentatives externes de contact. Elles sont toujours dangereuses et la décision d’initier un contact doit revenir à eux seuls. Ceux qui pénètrent sur les territoires des peuples non contactés leur dénient ce choix.

Tous les peuples non contactés courent à la catastrophe, à moins que leurs territoires ne soient protégés. Nous faisons tout notre possible pour sécuriser leurs terres et leur permettre de déterminer leur propre avenir.

Gardiens de la nature

Les peuples autochtones dépendent de leur environnement et le gèrent depuis des millénaires. Leurs terres ne sont pas des espaces vierges. Des études démontrent que les peuples autochtones savent, mieux que quiconque, prendre soin de leur environnement. Ils sont les meilleurs défenseurs de l’environnement et gardiens du monde naturel. Ils devraient être à la tête du mouvement de protection de la nature. Pourtant, les peuples autochtones sont expulsés illégalement de leurs terres ancestrales au nom de la protection de la nature. De grandes organisations de protection de la nature sont complices de cette situation. Elles ne se prononcent jamais contre ces expulsions.

Aujourd’hui, les peuples autochtones sont accusés de braconnage parce qu’ils chassent pour nourrir leurs familles. Ils risquent d’être arrêtés, battus, torturés et même tués, tandis que les amateurs de trophées de chasse sont encouragés. Or, cibler les chasseurs autochtones dévie l’attention de la lutte contre les véritables braconniers — des criminels qui complotent avec des fonctionnaires corrompus. Cibler les peuples autochtones compromet la protection de la nature. De grandes organisations de défense de l’environnement s’associent à l’industrie et au tourisme et détruisent les meilleurs alliés de l’environnement.

C’est une escroquerie. Et cela compromet le mouvement de protection de la nature. Nous menons la lutte contre ces abus, pour les peuples autochtones, pour la nature, pour toute l’humanité.

Nous travaillons avec les peuples autochtones du bassin du Congo et de l’Inde pour arrêter les expulsions et les abus commis au nom de la protection de la nature.

Avenir autochtone

La spoliation des terres est le plus grand problème auquel doivent faire face les peuples autochtones. A travers le monde, la société industrialisée vole les terres autochtones à la poursuite du profit. Ainsi se perpétuent l’invasion et le génocide qui ont caractérisé la colonisation des Amériques et de l’Australie.

Mais pour les peuples autochtones, la terre, c’est la vie. Elle comble tous leurs besoins matériels et spirituels. La terre leur fournit nourriture, habitat et vêtements. Elle est aussi le fondement de l’identité et du sentiment d’appartenance des peuples autochtones.

Le vol des terres autochtones détruit des peuples autosuffisants et leurs différents modes de vie. Maladies, misère et suicides en sont la conséquence. Les preuves sont irréfutables.

Ce n’est pas inévitable. Depuis des générations, le droit international reconnaît les droits territoriaux des peuples autochtones. Il est temps que les gouvernements et entreprises respectent cela. La spoliation des terres est un crime grave et fatal.

Pour assurer la survie et la prospérité des peuples autochtones, il est indispensable de leur laisser le contrôle de leurs terres. Nous faisons tout notre possible pour le leur garantir.

Voix autochtone

Voix autochtone est un projet de Survival International, le mouvement mondial pour les droits des peuples autochtones.

Gouvernements et multinationales tentent de réduire les peuples autochtones au silence. Ils les brutalisent et les assassinent. Ils volent leurs terres. Ils les qualifient d'« arriérés » et de « primitifs » — ce qu’ils ne sont pas.

Les peuples autochtones sont comme tout le monde : ils se préoccupent aussi de leur qualité de vie et de l’avenir de leurs enfants. Leur compréhension du monde est aussi fine que celle de quiconque et ils ont des choses pertinentes à dire sur presque tous les aspects de la vie d’aujourd’hui.

Voilà pourquoi nous donnons aux peuples autochtones l’accès aux nouvelles technologies afin qu’ils puissent adresser leur message au monde en temps réel.

Il est temps d'écouter.

Exemples d’actions menées :

Nukak

Les Nukak, des chasseurs-cueilleurs de l’Amazonie colombienne, ont pratiquement évité tout contact régulier avec le monde extérieur jusqu’à l’irruption inattendue, en 1988, d’un groupe d’une quarantaine d’entre eux à Calamar, dans la région d’El Guaviare.

Les conséquences de ce contact régulier furent désastreuses. Au cours des années suivantes, notamment en raison de la présence croissante de bûcherons, de cultivateurs de coca et de paramilitaires sur leur territoire, de plus en plus de Nukak entrèrent en contact avec des étrangers et succombèrent à des maladies telles que le paludisme ou la grippe, contre lesquelles ils n’étaient pas immunisés.

Environ 50% du peuple nukak est mort dans les années qui ont suivi le premier contact. Aujourd’hui encore, ils sont vulnérables aux maladies respiratoires aiguës, qui sont la principale cause de décès.

Les Nukak sont l’un des 65 peuples autochtones de Colombie en « risque imminent d’extinction physique et culturelle ».

En 1993, grâce à la campagne internationale en faveur des Nukak menée par Survival, l’ONIC et d’autres organisations, le gouvernement colombien a finalement reconnu les droits du peuple autochtone à son territoire ancestral. La « Réserve nukak » a été agrandie en 1997 et englobe à présent presque un million d’hectares de forêt. Malgré cette reconnaissance légale et la fin du conflit armé, les Nukak ne peuvent pourtant toujours pas retourner sur leurs terres.

La violente lutte pour le commerce de la cocaïne et le conflit armé entre les guérilleros, les paramilitaires et l’armée colombienne ont forcé les Nukak à fuir leurs maisons et à chercher refuge à la périphérie d’une ville appelée San José del Guaviare ou dans des camps improvisés près de la rivière Guaviare et les environs de la « Réserve nukak ».

L’accord final de paix, signé en 2016 entre le gouvernement colombien et les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie), fait mention au sein du « chapitre ethnique » d’un accord portant spécifiquement sur les Nukak, ainsi que leur retour, le déminage et la restitution de leur territoire.

Cependant, les Nukak n’ont toujours pas pu retourner sur leur terre. En raison de la présence de groupes armés dissidents, qui ne reconnaissent pas l’accord de paix, et de mines antipersonnel sur leurs territoires, le gouvernement colombien ne peut assurer le retour dans des conditions de sécurité.

Autrefois chasseurs-cueilleurs nomades, les Nukak sont aujourd’hui principalement des réfugiés sédentaires. Ils survivent dans des camps improvisés dotés de toits de zinc. Ils ne peuvent plus chasser ou pêcher pour se nourrir comme ils le faisaient auparavant et dépendent à présent de l’aide gouvernementale ; certains sont même exploités en tant que ramasseurs de coca. Ils souffrent de malnutrition et de maladies telle que la tuberculose. Aliénés et désespérés, beaucoup finissent par consommer de la drogue et de l’alcool. Les cas de violence domestique et d’abus sexuels sont en augmentation, tandis que certains mettent fin à leur vie en se suicidant.

Bien qu’ils aient été reconnus comme un peuple autochtone menacé d’extinction physique et culturelle par la législation colombienne, aucune mesure efficace n’a encore été prise pour restaurer les droits fondamentaux des Nukak, qui survivent dans des conditions de marginalisation, de misère et de discrimination par rapport à la société non-autochtone du pays.

Survival continue à faire pression sur le gouvernement pour qu’il respecte et fasse respecter l’accord de paix.

Kawahiva

Les Kawahiva sont un petit groupe d’Indiens isolés en Amazonie brésilienne qui se trouve sur le point de disparaître.

Depuis des années, Survival mène campagne et fait pression afin que leur territoire soit reconnu, mais il est en train d’être envahi par des bûcherons.

Les membres de la tribu sont contraints de constamment fuir pour échapper à la violence des intrus. Les attaques et les maladies ont tué leurs proches.

La campagne de Survival a poussé le ministre de la Justice à ordonner la démarcation du territoire kawahiva. La campagne, lancée en septembre 2015 avec l’aide de l’acteur britannique Mark Rylance, visait à faire pression sur le ministre afin qu’il démarque et protège le territoire de cette tribu isolée d’Amazonie.

Après avoir reçu plus de 14 000 mails, le ministre, Monsieur Eugênio Aragão, a signé le 19 avril 2016 le décret permettant la démarcation de ce territoire.

Survival International avait déjà remporté une victoire similaire. En 2014, les efforts inlassables des sympathisants de Survival ont poussé le Brésil à protéger le territoire d’un autre groupe de chasseurs-cueilleurs très vulnérables, les Awá.

 

Igapo Project

Igapo Project est une jeune association fondée pour contribuer à faire entendre la voix des peuples autochtones d’Amazonie. Ce projet a pour objectif de sensibiliser l'opinion publique aux menaces qui pèsent sur cette région du monde et à la manière dont sont bafoués les droits de ses habitants, en articulant problématiques environnementales et atteintes aux droits de l'homme.

S'appuyant sur un travail de terrain et sur les témoignages des communautés concernées, particulièrement de représentants de la société civile, Igapo Project met en lumière l’attitude inacceptable de gouvernements, de multinationales et autres entités, qui menacent un environnement unique, dont la permanence est essentielle pour la survie de notre monde, ainsi que les droits fondamentaux de ses habitants.

La structure a vocation à servir de porte-parole aux peuples autochtones du bassin amazonien. Souscrivant à une approche transversale, à la fois humanitaire, informative et artistique, Igapo Project souhaite porter les voix de ceux qui ne disposent que rarement d’une tribune. Nous dénonçons les atteintes aux droits humains et à l’ensemble du vivant, donnant à voir les problématiques inhérentes aux populations amazoniennes par le biais de campagnes de sensibilisation, d’articles, de reportages, d’expositions associant images et textes, de rencontres publiques et autres événements de sensibilisation.

Ce projet ambitionne également de jouer un rôle intermédiaire entre des initiatives locales et des fondations et ONG basées en Europe, afin de soutenir les projets d'autonomisation et de défense des peuples autochtones. Nous accompagnons des communautés dans leur recherche de financements en dehors de leur pays, afin qu’elles puissent concrétiser des projets liés à la protection de leur environnement, à l’ethno-éducation, à la défense des cultures et territoires autochtones, à la gestion autonome des ressources,... Nous fixons comme unique critère que ces projets soient conçus, portés et mis en oeuvre par les personnes directement concernées, et qu’ils soient destinés à promouvoir, consolider et faciliter l’indépendance de ces communautés.

Exemples d’actions menées en Colombie :

Département d’Amazonas : communautés tikuna, cocama et yagua

Nous soutenons un projet de protection des ressources naturelles et de transmission des savoirs traditionnels dans un resguardo (réserve autochtone) confronté aux impacts négatifs d’un tourisme de masse, dont la manne ne profite qu’aux 5 % de colons implantés sur le territoire.

Nous dénonçons également la déforestation illégale qui sévit dans le resguardo et ses alentours, ainsi que l’inaction et les politiques inopérantes, voire néfastes, du gouvernement colombien et des organismes étatiques de protection de la faune et de la flore.

Nous oeuvrons en partenariat avec plusieurs associations locales, fondées par et pour les communautés autochtones du resguardo. Les projets et initiatives sont menés dans une logique collaborative et participative, sous l’égide des autorités coutumières.

Département du Caquetá : communautés murui

Nous avons réalisé un reportage textuel, photographique et vidéo visant à dénoncer la pollution au mercure du fleuve Caquetá, qui menace l’existence d’un peuple déjà classé en voie d’extinction depuis 2009, et vivant dans une région considérée comme l’une des « zones rouges » de la Colombie.

Nous dénonçons la mainmise non seulement des orpailleurs illégaux, responsables directs de ce processus de contamination de la principale source de subsistance des Murui, mais également des narcotrafiquants et branches dissidentes des FARC, dont les sphères d’influence empiètent sur des territoires autochtones et soumettent ces derniers à leurs propres règles.

Ce reportage a été réalisé en concertation avec les autorités coutumières de trois communautés ; le contenu et la teneur qui en résultent sont le fruit d’un travail conjoint sur le terrain.

 

Cet évènement est organisé dans le cadre de

la Semaine de l’Amérique latine et des Caraïbes.

 


Entrée libre dans la limite des places disponibles. La réservation est obligatoire. Merci de nous écrire à l’adresse suivante : evenements-iheal@sorbonne-nouvelle.fr