Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine
Centre de recherche et de documentation sur les Amériques

"Tropicaliser la science". Soutenance HDR de David Dumoulin Kervran

20 novembre 2018, 9h00-13h00

 

Soutenance de David Dumoulin Kervran

Habilitation à diriger des recherches 

sous la direction de Dominique Pestre à l’EHESS

 

Ce travail est composé de 3 volumes :

- vol. 1. L’inédit :Tropicaliser la science. Politique du ‘terrain’ et biologie tropicale (533 p.) (cf. résumé ci-dessous).

- vol. 2. La Synthèse de recherche qui s’intitule : Conservation de la nature : une sociologie. Stratégie d’échelle et savoirs, formats d’action et conflits. (164 p.)

- vol. 3. Le recueil de publications.

 

La soutenance aura lieu le Mardi 20 novembre 2018, de 9h à 13h, au 4 rue des irlandais (75005, derrière le Panthéon), à la Maison de la Recherche de l’Université Sorbonne Nouvelle, Salle Athéna au RdC.

 

Le jury est composé de :

- Dominique PESTRE, Directeur de recherche EHESS, Centre Alexandre Koyre. (Garant).

- Florian CHARVOLIN, Directeur de Recherche CNRS, Centre Max Weber. (Rapporteur).

- Céline GRANJOU, Directrice De Recherche Université Grenoble - IRSTEA. (Rapporteure).

- Pablo KREIMER, Professeur Université Nationale de Quilmes - Directeur de recherche CONICET, Argentine.

- Kapil RAJ, Directeur d’Etudes EHESS, Centre Alexandre Koyre.

- Sandrine REVET, Directrice de Recherche FNSP, CERI-Sciences Po.

- Bruno LATOUR, Professeur émérite à Sciences Po Paris.

 

La soutenance sera suivie d’un buffet amical jusqu’à 14h, auquel vous êtes chaleureusement invités.

Merci de bien vouloir confirmer votre présence au plus vite à david.dumoulin@sorbonne-nouvelle.fr.

 

Résumé de l’inédit  « Tropicaliser la science. Politique du ‘terrain’ et biologie tropicale »

Dans quelles conditions les forêts tropicales ont-elles pu passer « de l’obscurité à la lumière », l’institutionnalisation de la biologie tropicale permettant, en à peine un demi siècle, une très rapide accumulation de connaissances sur des régions aujourd’hui très intensément scrutées, auscultées, instrumentées ? Les études sociales des sciences ont transformé notre regard sur la production scientifique dans les laboratoires, mais elle ont encore très peu étudié les pratiques « de terrain » et moins encore lorsqu’elles prennent place dans les marges des pays tropicaux où le système scientifique est longtemps resté, en quelques sorte, exotique.

Cette recherche vise à mettre en lumière les relations qu’entretiennent les biologistes tropicaux avec les lieux où ils travaillent, et plus largement, les dimensions politiques du travail de terrain dans ces antipodes des grandes universités où les scientifiques ne peuvent pas vivre, les forêts tropicales. A partir d’une enquête empirique dans plusieurs pays auprès des biologistes, l’auteur se penchent sur ce qu’il définit comme quatre « modalités d’ancrage dans la localité » de ces scientifiques, de plus en plus intimes : les expéditions caractérisées par leur taille et leur brièveté, les stations biologiques obligeant à un ancrage dans la durée, puis le recrutement de parataxonomistes qui incarnent l’oxymore des « scientifiques locaux », et enfin les recherches en ethnobiologie qui explorent la spécificité locale des relations société /biodiversité.

De ce parcours de recherche, émerge une nouvelle vision de cet ancrage dans la localité, qui est déterminé par des connexions extra-locales (condition du fieldworker et déterminations du « champs scientifique »), un ancrage qui se compose de relations complexes avec les humains, mais aussi et parfois surtout, les non humains de la localité.

Cette analyse des modalités d’ancrage dans différents pays permet de proposer une définition générique de cette « politique du terrain des biologistes tropicaux », recomposant des dimensions le plus souvent séparées. Cette relation entre biologistes et localités tropicales se caractérise par ce double mouvement de clôture sélective, qui est perceptible in situ, mais finalement d’inclusion, générée par de nouveaux savoir-pouvoirs. C’est est considérant l’articulation de différentes composantes que l’analyse restitue  à ce ‘travail de terrain’ une place singulière et étonnement riche dans la gouvernementalité contemporaine. Son ancrage dans des relations inégalitaires de type Nord-Sud, sa puissante insularisation sociale et épistémique (le confinement scientifique), et les modalités ‘d’engagement’ des biologistes avec les localités, constituent trois dynamiques qui viennent compléter une « politique » plus indirecte de ce développement de la biologie tropicale, en tension entre extension récente du biopouvoir vers l’ensemble de la biodiversité tropicale et transformation de la communauté politique par cette attention aux non-humains dont les biologistes se font les porte-paroles.

La connaissance des forêts tropicales est passée au centre des discussions sur la déforestation, la biodiversité, ou le changement climatique, et ces lieux modèles pourraient ainsi être qualifiés comme de très important truth-spots du dernier demi-siècle, surtout si on ajoute à cette analyse l’importance majeure que les peuples des forêts tropicales ont également reçu durant cette période au sein de l’anthropologie.