Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine
Centre de recherche et de documentation sur les Amériques

Célébrer les soixante ans de l’IHEAL

Olivier Compagnon, Sébastien Velut

Fondé en février 1954, l’Institut des hautes études de l’Amérique latine a célébré cette année ses soixante ans. Cet anniversaire a donné lieu à de nombreuses manifestations qui se sont succédé tout au long de 2014 et qui ont culminé par un événement festif organisé le vendredi 12 décembre dans nos locaux du 28 rue Saint-Guillaume. Ceux-ci avaient été inaugurés en 1956 par le président de la République, René Coty, accompagné de trois membres du gouvernement: François Mitterrand, Garde des Sceaux et ministre de la Justice, Christian Pineau, ministre des Affaires étrangères et René Billères, ministre de l’Education nationale. Le Recteur de l’Université de Paris, l’hispaniste Jean Sarrailh, avait joué un rôle déterminant dans cette création aux côtés de l’ethnologue Paul Rivet et du géographe Pierre Monbeig.

Soixante ans après,  la Garde des Sceaux et ministre de la Justice, Mme Christiane Taubira, a accepté l’invitation qui lui avait été faite de se joindre à nous pour cet anniversaire. Elle a prononcé dans notre grand amphithéâtre, devant un public enthousiaste composé de personnalités et d’étudiants nombreux, un discours soulignant l’importance de l’Amérique latine pour la France. Mme Taubira a notamment caractérisé le continent américain comme un espace de circulations et de métissages, véritable laboratoire de la modernité mettant au défi les vieilles structures étatiques de trouver des réponses adaptées aux aspirations actuelles des populations. Ses propos ont montré toute la pertinence de notre démarche, dans ses différentes dimensions, en en éclairant le profond sens politique: celui d’une responsabilité commune dans le contexte de la mondialisation.  

Avant elle, s’étaient succédé à la tribune le président du conseil de gestion de l’IHEAL, M. Stéphane Witkowski, l’administrateur provisoire de l’Université Sorbonne Nouvelle–Paris 3, M. Carle Bonafous-Murat, le directeur de l’IHEAL, M. Sébastien Velut et, en représentation du ministre des Affaires étrangères et du développement international, M. Yves Saint-Geours, directeur général de l’administration et de la modernisation et ancien ambassadeur de France au Brésil.

Lors de l’inauguration de 1956, l’ambassadeur de l’Uruguay en France avait pris la parole au nom de tous les représentants des Etats latino-américains à Paris pour saluer l’initiative de la création de l’IHEAL: «La France, avait-il déclaré, peut s’enorgueillir d’être jusqu’à présent la seule nation au monde à avoir créé un institut destiné à développer d’efficaces contacts entre les élites des peuples de notre continent, à rendre plus facile et plus féconde la compréhension réciproque des esprits». Soixante ans plus tard, d’autres Etats européens ont créé des structures similaires à celle de l’IHEAL, qui a montré toute son efficacité pour favoriser le dialogue et les échanges académiques entre les continents. L’IHEAL s’est imposé comme un lieu de rencontre transatlantique dont les murs ont vu passer non seulement de grandes figures intellectuelles et politiques, mais aussi plusieurs générations d’étudiants occupant aujourd’hui des postes de responsabilité. L’IHEAL a aussi montré la pertinence des choix scientifiques de ses fondateurs, reposant sur une pluridisciplinarité qui demeure plus que jamais au cœur des activités d’enseignement et de recherche proposées au 28 de la rue Saint-Guillaume. La structuration forte des formations a achevé d’ancrer l’IHEAL dans le paysage universitaire français et international, en faisant –ainsi que l’a noté M. Bonafous-Murat – un «fleuron» de l’Université Sorbonne Nouvelle–Paris 3.

Au long de ces soixante années, l’IHEAL a bien évidemment beaucoup changé. Comme l’a rappelé M. Yves Saint-Geours, il a souffert lorsque l’Amérique latine a traversé des moments de crise – qu’il s’agisse de la militarisation des sociétés dans les années 1960-1980 ou de la «décennie perdue» des années 1980 – et il a connu des drames comme l’assassinat de deux de ses étudiantes, Cassandre Bouvier et Houria Moumni, en Argentine en 2011. L’institution, grâce aux impulsions données par ses directeurs successifs et à l’action de ses personnels enseignants et administratifs, a toutefois toujours su s’adapter : elle est aujourd’hui dépositaire d’une identité forte et d’une réputation internationale. L’engagement de toute la communauté de l’IHEAL dans la préparation de la célébration des soixante ans témoigne mieux que tout qu’il est un bien commun, un actif partagé, une institution vivante qui peut sans crainte se projeter vers son Centenaire.
 

Image: