Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine
Centre de recherche et de documentation sur les Amériques

Colloque international Sciences, savoirs et pratiques des déchets

Colloque international
Sciences, savoirs et pratiques des déchets : dialogues entre mondes européens et américains

23 et 24 Novembre 2017
A l’Institut des Amériques (IdA),

Paris 60, boulevard du Lycée,
8ème étage - 92170 Vanves

Ce colloque s’intéresse aux déchets comme objets de sciences, de savoirs et de pratiques. En proposant un dialogue entre chercheurs et acteurs français et des Amériques, il interrogera les modalités de construction de la connaissance portant sur les systèmes d’organisation et de représentation des déchets dans les mondes européens et américains. Ce projet cherche notamment à savoir si l’on peut qualifier de « tournant épistémologique » l’intérêt que les sciences sociales manifestent pour les déchets comme objet de recherche mais aussi comme défi pour l’organisation des territoires.

En effet, les résidus ont longtemps été cantonnés au domaine du génie civil et de la médecine lors de leur « invention » comme catégorie de l’action publique urbaine, à la fin du XVIIIe siècle (Barles, 2002). Avec l’essor démographique et urbain ainsi que les préoccupations croissantes pour l’environnement, le développement durable et le changement climatique, les déchets font aussi leur entrée dans le champ des sciences sociales. La diversité des approches retenues souligne une réflexion riche et dynamique. L’essor de la « garbology » (Rathje, 1984) et de la rudologie (Gouhier, 1988) marque les premiers pas vers une approche des résidus comme outils du portrait des sociétés. Ces approches sont devenues consensuelles, au point de servir de base aux analyses prospectives de la production de déchets mondiale (Chalmin, Gaillochet, 2009) et aux recommandations de gestion formulées par de grandes institutions supra-nationales, telles que la Banque Mondiale.

Au-delà de cette approche, le « tournant culturel » (Claval, 2008) pris par les sciences sociales au cours des années 1980, d’abord dans les mondes anglophones puis dans les mondes francophones, a instauré de nouvelles manières de penser aux déchets. En ouvrant la discussion sur les enjeux socio-économiques et environnementaux des cycles de vie et du recyclage à plusieurs échelles, elles permettent un dialogue constructif avec les sciences du génie, portant sur la destination finale des déchets, les dispositifs de récupération et de revalorisation et l’économie circulaire. Par ailleurs, les géographes, les sociologues et les anthropologues ont aussi souligné l’importance des savoirs locaux, des approches émotionnelles et corporelles liées aux déchets (Douglas, 1966 ; Vergara, 2014).

Ces dernières mettent en évidence l’importance de prendre en considération le poids des représentations des déchets ainsi que de leurs enjeux normatifs, culturels et sociaux (Hawkins, 2008) dans la compréhension de leurs lieux et de leurs flux. Les approches en termes de justice environnementale, les lectures post-colonialistes, et en écologie politique (Bennett, 2010), tout comme les analyses qui insistent sur la responsabilité sociale des entreprises ont contribué à éclairer et mieux comprendre les divergences d’intérêt, les enjeux de pouvoir et les conflits qui sous-tendent la gestion des déchets.

En Amérique du nord, l’émergence des « discard studies » (Lepawsky, Liboiron, 2015) constitue une initiative audacieuse et féconde dans la mesure où l’objet rassemble les chercheurs, au-delà de l’approche disciplinaire. En France, en revanche, et dans plusieurs cultures universitaires latinoaméricaines, la question des déchets constitue un objet de dialogue sans que pour autant les approches propres à chaque discipline se dissolvent. En outre, la difficulté à situer les déchets d’un point de vue épistémologique met aussi en question le partage des compétences entre communautés épistémiques. Par exemple, prévenir les effets mal connus de la concentration de certains déchets dans des sites d’enfouissement (exemple des nanoparticules issues des appareils technologiques tels que les téléphones portables) repose autant sur les apports de la biochimie que sur la meilleure compréhension des pratiques de consommation et de mise au rebut. Enfin, ces enjeux ont un impact concret sur l’organisation de la gestion et l’aménagement des territoires des déchets au quotidien. L’incertitude environnementale, les débats autour de l’acceptabilité sociale mais aussi le souci d’avoir des pratiques plus économiques et soutenables engagent les savoirs politiques et l’éthique des pratiques de nombreux acteurs de terrain - gouvernements locaux, associations, entreprises, citoyens, etc.

Ce colloque tentera donc d’appréhender les enjeux méthodologiques, empiriques et théoriques qui sous-tendent les dialogues entre sciences, savoirs et pratiques des déchets. Le partage des expériences permettra de s’interroger sur l’existence de spécificités européennes et américaines dans la manière d’organiser les connaissances sur les déchets. Il aura pour but de mettre en discussion des chercheurs, des artistes et des praticiens issus des mondes européens et américains. Les déchets serviront d’objet-support à une discussion qui portera sur les grandes thématiques transversales suivantes :

1. Les sciences face au déchet - [Articles complets]
2. Les dialogues entre communautés épistémiques  - [Articles complets]
3. Les circulations entre scientifiques et praticiens - [Articles complets]
4. Les relations aux savoirs locaux - [Articles complets]
5. Aménager les territoires des déchets : implications mondiales, historiques et pratiques - [Articles complets]
6. Les déchets, objet culturel ? - [Articles complets]


Informations pratiques

Nous invitons les participants potentiels à soumettre un résumé de 500 mots maximum contenant cinq mots-clés et l'axe dans lequel s’insère la communication pour le 15 Juin 2017, à l’adresse électronique suivante : colloquedechets2017@gmail.com

Seront acceptés les résumés et les articles en français, portugais, anglais et espagnol. Le colloque se tiendra en quatre langues sans traduction simultanée. Dans un esprit d’ouverture nous ferons appel à des bénévoles pour assurer la traduction des échanges aux participants non francophones, si cela s’avère nécessaire (résumés, questions et réponses au cours des débats).

Les travaux sélectionnés seront identifiés à la fin juillet. Les auteurs devront alors envoyer leur article complet (40 000 signes max., 20 pages) avant le 1er octobre 2017.

Nous vous remercions pour votre intérêt et espérons que vous diffuserez amplement cet appel.

Où :

Institut des Amériques (IdA)
60, boulevard du Lycée – 8e étage 92170 Vanves (Metro ligne 12, arrêt Corentin Celton).

Dates à retenir :

15 juin 2017 : date limite pour l’envoi du résumé (500 mots et 5 mots-clés).
Fin juillet : Notification aux auteurs de l'acceptation ou du rejet des leurs propositions.
1er octobre 2017 : date limite pour l’envoi de l’article complet (40 000 signes / 20 pages).
23 & 24 novembre 2017 : colloque.

Comité organisateur :

Marcelo Pires Negrão, doctorant en géographie et chercheur associé au Centre de Recherche et de Documentation des Amériques (CREDA, UMR 7227), axe « Grands espaces » (IHEAL-CREDA, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3).

Marie-Noëlle Carré, docteure en Géographie,chargée de cours à l’Université de Montréal (Québec, Canada), chercheuse associée au Centre de Recherche et de Documentation des Amériques (CREDA), axe « Villes et métropoles ».

Comité scientifique

Sabine BARLES, professeure d’urbanisme, Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne
Claudia CIRELLI, chercheuse associée en anthropologie et géographie, Université de Tours
Martine DROULERS, chercheuse CNRS en géographie émérite, CNRS.
Bénédicte FLORIN, maître de conférences en géographie, Université de Tours
Myra HIRD, professeure, School of Environmental Studies, Queen's University, Canada
François-Michel LE TOURNEAU, chercheur CNRS en géographie, iGlobes, Tucson – UMI 3157
Baptiste MONSAINGEON, chercheur postdoctoral en sociologie, Centre Alexandre-Koyré
Laurence ROCHER, maître de conférences en urbanisme et aménagement, Université de Lyon 2
Francisco SUÁREZ, professeur en anthropologie, Universidad Nacional General Sarmiento, Argentine

Pour d’autres renseignements : colloquedechets2017@gmail.com

Références

Barles Sabine, L’invention des déchets urbains 1790-1970, Seyssel : Champ-Vallon, 2005, 297 p.
Bennett J., Vibrant Matter: a Political Ecology of Things, Durham: Duke University Press, 2010, 200p.
Chalmin Philippe, Gaillochet Catherine, Du rare à l’infini. Panorama mondial des déchets 2009, Paris, Economica, 2009.
Claval Paul, « La géographie culturelle dans les pays anglophones », Annales de géographie, n° 660-661, 2008, p. 8-26.
Douglas Mary, Purity and Danger, London : Routledge, 1966.
Gouhier Jean, Rudologie : science de la poubelle, Université du Maine, 1988.
Hawkins Gay, Ethics of Waste. How we relate to rubbish, New York : Rowman & Littlefield, 2008.
Lepawsky, Josh, Liboiron Max, “Why Discards, Diverse Economies, and Degrowth?”, Society & Space Open Forum. August 2015. En ligne : http://societyandspace.org/
Rathje William, Household Refuse Analysis: theory, method, and applications in social science, Beverly Hills, CA: Sage Publications, 1984.
Vergara Gabriela, “Emociones, cuerpos y residuos: un análisis de la soportabilidad social”, Revista Brasileira de Sociologia da Emoção, v. 13, n. 37, 2014, p. 43-58