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COMMUNIQUÉ
Les enseignant·es-chercheur·euses de l’IHEAL face à l’interpellation des étudiant·es
Le mercredi 15 mars 2023
L'équipe pédagogique de l'IHEAL a pris connaissance lundi 13 mars de l'interpellation et de la garde à vue d'un·e de ses étudiant·es, lors de la manifestation du 8 mars dernier. Alors qu'iel quittait le cortège avec un drapeau du mouvement lesbien, cet·te étudiant·e a été sommé·e par les forces de l'ordre de faire en sorte qu'il ne soit pas visible, alors même que ce dernier ne constitue en aucune manière un trouble à l'ordre public ou une incitation à la haine. Les protestations de cet·te étudiant·e l'ont amené·e à être interpellé·e par cinq agents et placé·e en garde à vue. Le récit de cette interpellation et des circonstances de cette garde à vue a été publié par le collectif auquel elle appartient par Mediapart. Les insultes, les menaces, les manquements au respect des droits les plus élémentaires de toute personne placée en garde à vue (notamment en termes de respect de l'intégrité physique), ainsi que le caractère arbitraire de cette arrestation, nous amènent à nous interroger, en tant qu'universitaires et citoyen·nes, sur le respect de l'Etat de droit en France.
Les faits rapportés révèlent non seulement d'intolérables comportements sexistes et homophobes de la part d'agents de l'Etat censés garantir le respect des droits fondamentaux des citoyen·nes, mais entrent également en résonance avec un contexte plus large de répression de la mobilisation sociale dès lors que des étudiant·es y participent ou l'organisent. Pour rappel, lors de l'entre-deux-tours de l’élection présidentielle, des universités et des campus ont été “préventivement” fermés afin d'empêcher que ne se tiennent des assemblées générales. Le 23 janvier dernier, 29 étudiant·es du Campus Condorcet ont également été, de façon préventive, arrêté·es et placé·es en garde à vue suite à l'organisation d'une assemblée générale dans le cadre de la mobilisation contre la réforme des retraites. Cet épisode a lui aussi été caractérisé par des injures et des menaces de la part des forces de l'ordre à l'égard des étudiant·es concerné·es.
Manifester, participer aux débats et organiser des assemblées générales ne constituent pas des infractions ; user de sa liberté d'expression, revendiquer des droits, appeler au respect de la diversité, faire valoir une position politique ne sont pas des délits, mais au contraire la garantie et le signe d'une démocratie réelle. Les universités sont des espaces de dialogue et de formation citoyenne, au sein desquelles les étudiant·es débattent et participent aux luttes sociales en cours.
La criminalisation des mobilisations et l'intimidation de leurs acteur·rices, qu'iels soient ou non issu·es du monde universitaire, sont de graves atteintes à l'Etat de droit et à la démocratie. En tant qu’universitaires spécialistes de l'Amérique latine et observateur·rices des dérives autoritaires contemporaines, nous savons le danger que représentent de telles pratiques. Nous dénonçons avec la plus grande fermeté des actes et une politique qui sont en totale contradiction avec les valeurs que nous portons.
Nous demandons à ce que nos espaces d’étude et de travail demeurent des espaces de débats ouverts sur la société. Nous exigeons que les droits et les libertés des citoyen·nes qui manifestent soient respectés par les forces de l’ordre. Nous appelons à porter une vigilance particulière aux droits et libertés des citoyen·nes structurellement minorisé·es et discriminé·es.
Les enseignant·es chercheur·euses de l’IHEAL.