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Exils politiques dans le long XIXème siècle en Amérique latine et dans la Caraïbe
Cet appel est disponible en espagnol, anglais et français à ce lien.
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Exils politiques dans le long XIXème siècle en Amérique latine et dans la Caraïbe
27-28 juin 2019, Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3
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La question de l’exil politique a fait l’objet d’un regain d’attention ces dix dernières années. Pourtant, la juxtaposition des termes « exils » et « Amérique latine » renvoie encore à la Guerre Froide, aux dictatures sud-américaines, ou aux guerres civiles d’Amérique Centrale. C’est ce constat qui nous amène à questionner le rôle de l’exil au cours des époques précédentes et en particulier durant le XIXe siècle, souvent considéré comme le siècle des indépendances, du républicanisme et de l’Etat-Nation. Or l’exil a aussi été une composante centrale des processus politiques et sociaux du continent durant ce siècle.
On comprend ici le terme « exil » dans son sens le plus large, incluant l’idée d’expulsion tout comme la question des sociétés d’accueil. De fait, l’Amérique latine peut être une terre que l’on fuit mais aussi un lieu d’asile. Certains chercheurs se sont penchés sur ces questions à la lumière du récent engouement pour les thèmes liés à l’exil politique. Dans leur livre The Politics of Exile in Latin America (1ère édition en anglais en 2009), Luis Roniger et Mario Sznajder proposent un panorama global de l’exil latino-américain qui inclut une réflexion sur l’exil du XIXème siècle, présupposant un lien fort entre exil et construction de l’état. Rafael Rojas a lui aussi proposé une analyse des indépendances centrée sur la question des exils (Las Repúblicas del aire, 2009). Cela étant, peu de travaux historiques existent sur cette question en comparaison avec le nombre d’ouvrages qui lui sont consacrés pour le XXème siècle.
Les recherches déjà existantes suggèrent que les exils ont joué un rôle fondamental dans les cultures politiques latino-américaines et qu’ils se trouvent au cœur de leur fonctionnement politique. Ce colloque entend interroger cette idée, afin de voir à quel point l’exil s’intègre aux manières de faire de la politique dans la région.
Ce questionnement sera guidé par les axes suivants :
1) Exils individuels et collectifs
Les grandes figures de l’exil correspondent souvent aux grandes figures de l’« histoire-patrie », comme Bolivar, San Martin ou O’Higgins entre autres. Si leurs exils sont pris en compte dans leurs biographies, ils sont souvent décrits comme des absences de la scène nationale, ou parfois confondus avec les voyages de formation des fils de la bourgeoisie, sans que soient problématisées les stratégies politiques qui vont avec la fuite ou la délocalisation.
D’autre part, l’idée que l’exil individuel est le seul fait des élites politiques et intellectuelles et que l’exil massif serait un phénomène propre au XXème siècle et à sa supposée « politique des masses » persiste encore. Pourtant, les points de vue de l’histoire des migrations et des études transnationales invitent à repenser ces présupposés et à réfléchir à l’inclusion d’acteurs populaires plus ou moins anonymes dans les rangs de l’exil comme les paysans, ou les soldats, qui étaient amenés à passer des frontières et à traverser divers territoires au cours de leurs vies.
2) Espaces, frontières, escales
L’Amérique latine a été lieu d’exil et lieu d’expulsion. Pour comprendre l’exil latino-américain dans toute sa complexité, il est important de dépasser les vagues d’exil les plus connues, comme celles des Espagnols fuyant la guerre civile, des officiers napoléoniens plus d’un siècle plus tôt, ou des nombreux « voyages-exils » vers l’Europe que font les élites politiques du XIXème siècle. Il faut donc penser les différents circuits (caribéen, andin, autour du RÃo de la Plata) sans oublier leurs connexions avec les différents escales du continent (qui ne sont pas seulement latino-américaines, mais qui incluent aussi les territoires de l’empire espagnol jusqu’en 1898 ainsi que les nouveaux circuits dessinés par l’expansion états-unienne sur le continent). Ces circuits s’insèrent très souvent dans des courants migratoires déjà existants. Les migrations dites « économiques » sont souvent voisines des migrations considérées comme politiques et il est souvent difficile d’établir une différence nette entre les deux.
La question des échelles est aussi centrale pour ce qui est des frontières et des circulations transnationales à une époque de construction de l’état-nation. En effet, l’étude de l’exil peut amener à réévaluer le rôle et la définition des frontières de toutes sortes. On peut ainsi envisager l’étude de frontières « internes », celle de la distance, voire de l’absence comme incarnations de l’exil, en particulier dans le cadre impérial espagnol. De fait, cette section s’interrogera aussi sur les limites poreuses entre exil, migrations et circulations transfrontalières.
3) Culture matérielle de/dans l’exil
Récemment, les historiens ont porté leur attention sur un champ d’étude peu exploré auparavant : il s’agit de la dimension matérielle su passé. Ainsi, les objets, les trajets et les moyens de transport et de communication tout comme les biens personnels et les lieux se sont transformés en autant de nouveaux indices sur les vies passées. Si l’exil à première vue semble interdire la prolifération matérielle, il s’avère qu’il multiplie par certains aspects la dimension concrète de l’existence. Les lettres par exemple, se font plus nombreuses et les objets qui voyagent avec soi acquièrent une dimension symbolique particulièrement forte. De là la question : comment survivre en exil ? Les conditions de vie s’adaptent au déplacement forcé ou volontaire.
4) Politiques d’exil
L’objectif le plus évident de l’exil est de faire de la politique à l’étranger avant de pouvoir transposer le résultat de ce travail au territoire que l’on veut changer « depuis l’extérieur ». Ce processus de la « politique d’exil » (Stéphane Dufoix) doit être ici entendu dans son acception la plus large, indépendamment des idéologies des différents acteurs. Au lieu d’accoler des étiquettes, il s’agit d’analyser les processus et les particularités de cette « politique depuis l’extérieur » afin de savoir ce qu’ils apportent ou non à la politique nationale, impériale ou transnationale.
Un autre aspect important de cette question concerne les politiques d’accueil. Les acteurs qui sont confrontées à l’arrivée de ces vagues d’exil doivent adopter une attitude qui peut aller de la répression à l’intégration et à l’incorporation des émigrés à la vie politique et publique, ainsi qu’au marché du travail.
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Instructions pour les auteurs :
1. Les résumés (tant comme les interventions) peuvent être présentés en espagnol, français, anglais ou portugais. Les résumés, d’un maximum de 500 mots, doivent être accompagnés par un paragraphe biographique et envoyés à l’adresse suivante : exilios.latinoamericanos.xix@gmail.com
2. La date limite pour envoyer des proposition est le 1 décembre 2018​. Les auteurs sélectionnés seront notifiés le 15 janvier 2019.
3. La date limite pour envoyer un brouillon écrit est le 25 mai 2019
4. Nous espérons pouvoir payer le billet des participants en fonction du budget final du colloque. Nous pouvons également faciliter le logement dans des résidences universitaires.
5. Nous avons le projet de publier une sélection des textes dans un dossier de revue ou dans un ouvrage collectif.
Organisateurs ​: Edward Blumenthal (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3) et Romy Sánchez (Université de Caen Normandie)
Comité scientifique : ​Jeremy Adelman (Princeton University), Alejandro Gómez (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3), Pilar González Bernaldo (Université Diderot Paris 7), Annick Lempérière (Paris 1), Luis Roniger (Wake Forest University), Natalia Sobrevilla (Kent University), Clément Thibaud (EHESS)