Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine
Centre de recherche et de documentation sur les Amériques

Le Guatemala et l’Accord de Paris

Par Marco Tulio CHICAS SOSA

Le Guatemala et l’Accord de Paris

 

Dans les pays les plus vulnérables, les catastrophes naturelles sont causées principalement par les phénomènes climatiques. Plus encore que les phénomènes géophysiques[1], les inondations et les glissements de terrain en sont les principaux responsables. Au Guatemala, le problème du changement climatique est un sujet très sensible. D’après l’indice global de risque (World Risk Report)[2], ces dernières années, le pays a été classé au quatrième rang des pays les plus vulnérables face aux désastres naturels.

Dans ce contexte, tout effort sérieux -comme l’Accord de Paris- entrepris dans le but de réduire le réchauffement global engendre un intérêt marqué.

D’après les statistiques de la Banque mondiale, pour la période comprise entre 1960 et 2013, les estimations sur le niveau des émissions de tonnes métriques de dioxyde de carbone selon le revenu par habitant sont passées au niveau mondial de 3,1 à 5,0. Les pays membres de l’Union européenne sont passés de 5,8 à 6,7 (la France a connu une tendance à la baisse en passant de 5,8 à 5,1). Les États-Unis sont passés de 16 à 16,4 ; la Chine, de 1,2 à 7,6 ; l’Inde, de 0,3 à 1,6 ; le Brésil, de 0,6 à 2,5 ; tandis que la moyenne de la région Amérique latine et Caraïbes est passée de 1,3 à 3,0[3].

Le Guatemala est un pays très vulnérable face aux catastrophes naturelles, en particulier d’origine climatique. Son empreinte carbone est basse, en 1960, les émissions de tonnes métriques de dioxyde de carbone selon le revenu par habitant étaient de 0,3 et elles sont passées en 2013[4] à 0,9. Bien que le niveau ait triplé sur une période d’un peu plus de 50 ans, l’empreinte carbone du pays  reste très en-dessous de la moyenne mondiale et de celle de l’Amérique latine.

Ainsi, l’adhésion à l’accord de Paris relève de la légitimité morale : il s’agit d’exiger à la communauté internationale une attitude responsable face à la gravité du problème du changement climatique. Alors que l’empreinte carbone du Guatemala est modeste, le pays subit de manière disproportionnée les impacts climatiques.

C’est pour cette raison que les résultats de la COP21 et de l’Accord de Paris ont généré beaucoup d’espoir. Je me souviens de l’ambiance qui régnait pendant les réunions préparatoires : en tant qu’Ambassadeur du Guatemala en France, j’ai eu l’occasion d’accompagner les autorités guatémaltèques qui ont participé aux rencontres organisées dans les anciens locaux de l’Imprimerie Nationale, rue de la Convention. J’ai plus d’une fois remarqué que l’incertitude était palpable et que le fantôme de l’échec de Copenhague planait lors des conversations de la pause-café.

Mais parallèlement, l’enthousiasme lié aux attentes de la négociation et l’intensité des points de convergence ne faisait qu’augmenter au fur et à mesure qu’approchait la COP21. Dès la fin de l’année 2015, le centre de conventions de l’aéroport du Bourget a été le témoin de longues journées de négociations, de courses contre la montre qui ont débouché sur l’accord tant attendu.

Pourtant, l’Accord de Paris reste très en-deçà des attentes du Guatemala. Les  experts environnementaux s’entendent pour dire que cet accord est loin d’être la panacée qui permettra de résoudre les problèmes liés au changement climatique.

En réalité, le succès de l’Accord de Paris est d’avoir réussi à trouver un juste milieu et d’avoir mis d’accord les différentes parties dont les positions étaient parfois diamétralement opposées. On peut en ce sens le considérer comme une œuvre d’art de la diplomatie du nouveau millénaire. Le résultat de ce travail complexe et minutieux a permis d’aboutir à des accords minimes et à des consensus qui ne satisfont intégralement aucune des parties mais qui redistribuent les responsabilités avec un réalisme politique et un pragmatisme diplomatique remarquables.

L’Accord de Paris représente la lumière au bout du tunnel, l’espoir d’un changement culturel dans les modes de consommation, l’engagement sérieux et ambitieux de l’être humain avec son environnement, l’équilibre entre la croissance économique et le développement durable.

La réunion qui s’est tenue le 8 juin dernier à Paris entre Jimmy Morales, Président du Guatemala, et son homologue français, Emmanuel Macron, a souligné la responsabilité urgente de soutenir l’Accord de Paris. Cette réunion a permis de rappeler la convergence d’idées et de principes, de valeurs et de visions de ces deux nations, géographiquement éloignées, mais qui n’en sont pas moins proches et qui sont toutes deux convaincues par l’importance historique et transcendantale de l’Accord de Paris.  

*Marco Tulio Chicas Sosa est ambassadeur du Guatemala en France depuis 2013.

Â