Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine
Centre de recherche et de documentation sur les Amériques

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Berkeley 2015: Dans un monde globalisé, les étudiants étrangers représentent une population vivant suivant le principe de l'« ici et l'ailleurs »
© Cynthia Ghorra-Gobin

Vivre ici et ailleurs : vers la généralisation de l'expérience diasporique

Zoom sur l’article « La généralisation de l’expérience diasporique » de Cynthia Ghorra-Gobin, publié dans la revue Urbanisme (n° 402, 2016).

Au métro, dans les gares, dans la rue... nous avons tous vu cette image se répéter, elle est devenue un cliché : des yeux fixés sur un écran, des doigts qui tapent des messages à toute vitesse, des gens qui communiquent avec d’autres personnes qui ne sont pas physiquement présentes. C’est le fait d’être ici, dans un espace à un moment, mais aussi d’être ailleurs, dans une autre ville, un autre fuseau horaire, une autre réalité.

Ce cliché a pourtant une dimension moins souvent évoquée : celle qui rappelle que depuis longtemps l’expérience d’être lié à un espace différent à celui où l’on habite était autrefois réservée presque exclusivement aux populations diasporiques, c’est-à-dire aux peuples migrants qui, en restant en contact avec leurs proches dans leurs pays d’origine, habitaient à la fois un espace physique, l’ici, et, en même temps, un espace situé ailleurs, construit à partir d’échanges épistolaires, de voyages et du contact continu avec leur culture (presse, cinéma, littérature, télévision…)

Aujourd’hui, ce phénomène est de plus en plus répandu grâce à la révolution numérique et notamment à l’utilisation généralisée du smartphone, qui permet « à tout individu de maintenir régulièrement le contact avec d’autres individus localisés ailleurs, dans d’autres métropoles, à la campagne ou tout simplement dans le bled »[1]. Il s’agit de la « généralisation de l’expérience diasporique », une notion avancée par Cynthia Ghorra-Gobin, géographe et urbaniste au CREDA, qui observe dans ces pratiques très actuelles un écho des pratiques diasporiques, en remarquant qu’elles ne se limitent plus aux seuls migrants.

 « Vivre ici et ailleurs c’est la capacité qu’ont les gens de pouvoir fonctionner en relation avec d’autres personnes indépendamment de leur localisation », nous explique Cynthia Ghorra-Gobin en interview. Ce mode de fonctionnement, aujourd’hui généralisé, provoque forcement de nouveaux rapports avec les espaces vécus, dont les limites ne sont plus les référents spatiaux mais plutôt ceux de la connectivité. Ainsi, outre la proximité spatiale, les gens maintiennent une proximité relationnelle qui leur permet d’un côté d’expérimenter de façon particulière l’espace physique habité et d’un autre côté, de faire partie d’une globalité, même en restant au niveau local.

L’article s’intéresse ainsi aux différents impacts de cette proximité relationnelle sur les modalités de l’aménagement métropolitain. En effet, si les métropoles accueillent de plus en plus de populations pour qui « l’habiter ici et ailleurs » est quasi quotidien, elles doivent prendre en considération cette projection vers le global dans leur gestion et leur aménagement, en arrivant à préserver un ancrage avec leur identité locale.

« Vers la généralisation de l’expérience diasporique » est l’article principal du dossier Vivre ici et ailleurs, de la revue Urbanisme. Ce dossier s’interroge sur les liens entre diasporas, mondialisation, globalisation et métropolisation.

Cynthia Ghorra-Gobin est directrice de recherche et coordinatrice de l'Axe Villes et territoires métropolitains dans les Amériques: enjeux sociaux et environnementaux du CREDA.



[1] Ghorra-Gobin Cynthia, « Vers la généralisation de l’expérience diasporique », Urbanisme, n° 402, 2016.

 


Publié le 24 février 2017 - La Lettre de l'IHEAL-CREDA, n° 3, mars 2017.

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