Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine
Centre de recherche et de documentation sur les Amériques

Édito

E la nave va? Qatar 2022, un nouveau chapitre dans la géopolitique des Coupes du monde

Bernardo Buarque De Hollanda

**Français**

 


 

E la nave va?

Qatar 2022, un nouveau chapitre dans la géopolitique des Coupes du monde

 

 

Bernardo Buarque de Hollanda

Escola de Ciências Sociais (FGV CPDOC) – Brasil

Chercheur invité à l’IHEAL/CREDA – 2022-23

 

 

Lorsque cette Lettre sera publiée, au début de l'année 2023, l'attention du public pour la Coupe du monde au Qatar aura décliné. Quel que soit le résultat sur le terrain, d'autres agendas, supposés plus "nobles" et importants qu'une compétition de football, tels que l'économie, la politique, la guerre, l’auront remplacée dans le flux médiatique de l'actualité internationale. C’est d’ailleurs là une des caractéristiques du "présentisme" et de la dynamique médiatique du XXIe siècle : l'expérience intense et concentrée autour d'un phénomène, rapidement suivie d'un autre, reléguant le précédent à un souvenir de moins en moins net.

 

Néanmoins, l'interrègne d'un mois du tournoi international de la FIFA, organisé à un moment exceptionnel, durant l'hiver européen, à la fin de l'année 2022, en raison de la géographie et du climat du pays hôte - la minuscule enclave désertique du Golfe Persique -, a la capacité cyclique de réactiver l'imaginaire compétitif par le biais du nationalisme sportif. À la manière des anciennes expositions universelles, ce tournoi fait revivre la parade et la compétition symbolique des nations au XXIe siècle. Ces dernières, comme on le sait, ont réinventé le sport moderne au début du XXe siècle, grâce à l'avènement des Jeux olympiques de 1896, conçus par le Comité international olympique et par l'aristocratique baron Pierre de Coubertin. Pendant l'entre-deux-guerres, à la fin des années 1920, les Jeux olympiques ont donné lieu à une dissidence qui a engendré, à son tour, les Coupes du monde de football.

 

L'invention connaît un succès progressif, avec pour chef d’orchestre la FIFA (créée en 1904), autre organisme à l’origine française et dont Jules Rimet est une figure centrale. La compétition se déroule dans un contexte de controverses liées au schisme entre amateurs et professionnels à la fin des années 1920 et au début des années 1930. Les managers de football adhèrent à l'option professionnelle, tandis que les modalités athlétiques de l'Olympisme restent marquées par l’attachement à l'éthos amateur. Ce contrepoint est fixé dans le calendrier sportif de l'après-guerre lui-même, avec la cristallisation de la périodicité quadriennale et l'alternance entre les Jeux olympiques du CIO et les Coupes du monde de la FIFA. Les deux institutions se sont par ailleurs toutes deux implantées en Suisse, cherchant un refuge contre les vicissitudes politico-guerrières des grandes puissances et une certaine protection dans la gestion de leurs finances dont la croissance est exponentielle à partir des années 1970.

 

La croissante porosité du football aux injonctions du capital dans la médiation, la régulation et l'organisation d'un événement d'envergure internationale n'est pas sans produire des exceptions intéressantes du point de vue de la logique du capitalisme. Après tout, la patrie capitaliste émergente par excellence du XXe siècle, les États-Unis, après deux participations occasionnelles aux tournois de la FIFA, en 1930 et 1950, ne produit pas une société intéressée par ce sport ni une équipe de qualité capable de se démarquer, à part un ou deux immigrants, comme le footballeur semi-professionnel d'origine haïtienne, Joe Gaetgens.

 

Les États-Unis ne sont réapparus sur la scène géopolitique du tournoi que dans les années 1990, avec suffisamment d'influence pour assumer la responsabilité d'organiser une Coupe. Ils sont entrés en scène tardivement, dans le but de modifier l'axe gravitationnel traditionnel du football - la dyade Europe/Amérique du Sud. L’idée était de populariser le soccer dans ce pays, même si cela ne se traduisait que par la transformation improvisée de stades de baseball et de football américain pour la Coupe du monde de 1994.

 

Autre forme d’exception dans le langage et la pratique du nationalisme footballistique, géré par la FIFA francophone : l'éloignement politique de la Grande-Bretagne, berceau de la modernité sportive depuis le XIXe siècle. Cette absence initiale n’est conjurée qu'au milieu des années 1950 avec l'élection, à la tête de la FIFA, de Stanley Rous, un ancien arbitre anglais, qui est restée au pouvoir jusque dans les années 1970. Ainsi, si les Jeux olympiques reflétaient le monde bipolaire et mettaient en scène dans la Guerre froide la compétition pour les médailles entre Américains et Soviétiques, le clivage à l’œuvre en ce qui concerne les Coupes du monde se joue dans l’alternance de conquêtes entre Européens d’une part et Sud-Américains d’autre part.

 

Cette dynamique continentale se traduit en termes institutionnels des deux côtés de l'Atlantique. D'un côté, il y a la Confédération Sud-américaine de Football (Conmebol), créée dans les années 1910 et organisant des compétitions internes à la région, dont la Copa América depuis 1916 ; de l'autre, il y a Union des Associations Européennes de Football, dont l'émergence remonte aux années 1950 et qui permet au continent européen de commencer à structurer des championnats de clubs et de nations. Ce processus historique est reconstitué, à travers des sources primaires, par les recherches denses et originales de l'historien suisse Philippe Vonnard (2018).

 

L'échiquier du pouvoir sportif est bouleversé au milieu des années 1970, lorsqu'un dirigeant brésilien, João Havelange, formule pour la première fois une candidature non européenne à la succession de la présidence de la FIFA. Soutenu par les votes des pays représentant l'Asie, l'Afrique et les Amériques, et après un grand travail en termes de diplomatie sportive, le président de la Confédération brésilienne des sports, remporte les élections et met fin à l’hégémonie anglo-saxonne de Rous et française de Rimet.

 

Si l'on parle beaucoup de l'inflexion capitaliste de la Fédération depuis lors, le contexte antérieur, qui a créé les conditions de tels changements et qui a conduit à la victoire de Havelange, a été analysé avec finesse par deux jeunes chercheurs. L'un d'eux est l'historien brésilien Luiz Burlamaqui : dans une thèse soutenue à l'Université de São Paulo et publiée en portugais et en anglais (2022), il analyse cette élection comme un "point d'arrivée" plutôt que comme le "point de départ" de l' « Ère Havelange ».

 

Un autre travail remarquable est celui du chercheur Clément Astruc (docteur en histoire de l’IHEAL-CREDA, 2022), qui explore avec originalité la diffusion de l'image du football brésilien dans la période qui suit la Seconde Guerre mondiale, non seulement par le biais des performances victorieuses de la Seleção dans les Coupes du monde (1958, 1962 et 1970), mais également à travers des tournées des clubs de Pelé (Santos) et Garrincha (Botafogo). Cette circulation est, d’une part, au cœur d’une série d’initiatives diplomatiques de la part des acteurs de la politique étrangère brésilienne des années 1960 et 1970, et constitue, d’autre part, un capital politique qui sera très bien mis à profit par Havelange durant son mandat de président de la FIFA.

 

Ce mandat, s’étend de 1974 à 1998, a vu le renforcement monopolistique et l'expansion vertigineuse de l'entité. De manière assez paradoxale, c'est Havelange, le représentant du "tiers-monde", qui approfondit la conversion de la Coupe en un spectacle commercial et en un produit commercialisable, approprié par les sociétés de télévision et les entreprises de sponsoring.

 

Au terme de son mandat, l’expansion de la FIFA est telle qu’elle semble donner raison à ceux qui affirment qu’elle compte plus de pays membres que l'ONU : de 16 équipes participantes depuis 1930, on passe à 24 en 1982 et à 32 en 1998, transformant cet événement sportif en un spectacle toujours plus représentatif des différentes parties du globe.

 

En résumé, un autre "héritage" de l’« Ère Havelange » - et nous nous approchons ici du cas de Qatar 2022 - est la fin de la rotation entre l'Europe occidentale et l'Amérique du Sud pour l'organisation de la Coupe. Bien que l'on ne puisse évidemment pas attribuer à la volonté d'un agent exclusif un processus dont les fondements sont systémiques et structurels, ce dirigeant incarnait l'esprit expansionniste de l'entité. Le Brésilien ne quitte la Fédération qu'en 1998, après presque deux décennies et demie à sa tête, avec la décision prise de choisir la prochaine Coupe dans un pays de l'Est. Cette édition a finalement été répartie entre deux candidatures - ce qui est sans précédent dans l'organisation du tournoi - compte tenu de la mobilisation nationale déclenchée par deux pays : le Japon et la Corée du Sud.

 

Havelange quitte le pouvoir, affûte son éthique mercantile et élit même son successeur, le secrétaire général de la FIFA Joseph Blatter, un ancien joueur de la petite équipe suisse de Neuchâtel Xamax. Les vingt dernières années (2002-2022) ont intensifié l'agenda expansionniste de la FIFA, avec pour mission de gagner d’autres latitudes et d'atteindre de nouvelles frontières géographiques attrayantes pour ses intérêts financiers.

 

Cela s'est concrétisé par l'organisation d'une Coupe du monde en Asie (2002) et d'une autre en Afrique (2010). Il s'agit également d'un pari sur les nations émergentes des BRICS (Brésil, Russie, Inde et Chine), qui, au cours de la première décennie du XXIe siècle, ont présenté des conditions politiques et économiques attrayantes et rentables pour accueillir une Coupe du monde. Ce qu'il faut désormais, c'est un pays dont l'État ait la capacité financière de construire, en même temps, une infrastructure avec des équipements sportifs, urbains et touristiques.

 

Cependant, entre-temps, à la mi-2010, le projet de monopole du pouvoir connaît des revers, qui dépassent les tensions internes de la contestation et acquièrent une dimension publique. Il s'agit de la réaction du monde anglo-saxon, avec le déclenchement du FIFAgate, dans un processus d'enquête coordonné par le FBI américain. Sont alors révélés des scandales de corruption, d'achat de votes et de transactions douteuses par des agents sur le terrain - présidents de confédération, sociétés de parrainage, etc. -, ce qui inclut le choix du Qatar comme pays hôte.

 

L'intensité des accusations génère des dommages conjoncturels. Le duo Blatter-Jérôme Valcke, respectivement président et secrétaire général, a été démis de ses fonctions à la tête de la FIFA, des dirigeants de confédérations et des propriétaires de marques sportives sont arrêtés ou font l'objet d'une enquête. Si ces enquêtes, perçues par certains analystes comme des représailles de la part de l’Angleterre et des États-Unis suite à leur candidature malheureuse pour accueillir les Coupes de 2014 et 2022, provoquent une onde de choc certaine, elles ne compromettent pas l’édifice : l’Italien Gianni Infantino est ainsi conduit à la tête de la FIFA et maintient la domination eurocentrique de cette dernière et signe la poursuite de son projet d'expansion.

 

Tous les soupçons qui pèsent sur le choix du Qatar ne suffisent pas pour que le nouveau président revienne sur sa décision. C'est un pays aussi petit que l'île caribéenne de la Jamaïque, avec deux millions de résidents, dont seulement trois cent mille sont des citoyens, le reste étant des immigrants, cantonnés à un travail subalterne. Le territoire qatari se situe entre deux nations fortes en termes géopolitiques : l'Arabie Saoudite et l'Iran. Sa taille géographique réduite ne compromet pas sa condition de superpuissance économique, puisqu'il est l'un des principaux producteurs de gaz naturel liquéfié au monde, stratégique, donc, en période de crise énergétique aiguisée par la guerre russe en Ukraine. Au cours des vingt dernières années, la richesse de plusieurs milliards de dollars tirée des ressources naturelles a conduit le gouvernement qatari à transformer Doha en une capitale culturelle et en une vitrine dédiée à un luxe aussi ostentatoire qu’artificiel.

 

Cela explique pourquoi un pays dépourvu de toute tradition sportive – à la différence, par exemple, de la traditionnelle ferveur turque pour le football -, comme en témoigne la piètre performance de l'équipe qatarie lors des trois matchs du premier tour de la Coupe du monde 2022, a été choisi pour la tenue de cet événement : il dispose de tout l'argent du pétrole pour construire huit gigantesques stades ultra-technologiques et "modernes". L'organisation de la Coupe du monde au Moyen-Orient s'est faite au prix de l'exploitation avilissante de la main-d'œuvre immigrée internationale et de gadgets financiers prédateurs qui constituent des aberrations climatiques, comme l'expérience sans précédent de la climatisation à l'intérieur des stades.

 

Face à cela, les tentatives occasionnelles de boycott de la part de supporters organisés, de mouvements sociaux et de certaines fédérations de football en Europe, relayées par des articles de presse et des plaintes de l'opinion publique, n'ont pas été en mesure d'arrêter le projet de concentration du capital de la FIFA, désormais dirigée par Infantino.

 

Compte tenu de la longévité d'un tournoi qui s'apprête à fêter son 100e anniversaire, l'Uruguay et l'Argentine parviendront-ils à sensibiliser à satisfaire la cupidité de la FIFA et à organiser une autre Coupe du monde en 2030 dans le Cône Sud, pour commémorer le centenaire de l'événement en 1930, le bicentenaire de l'indépendance du petit pays du Rio de la Plata et la reconnaissance du triomphe de l'Argentine en 2022 ? Le Qatar n'est qu'un chapitre de plus, dans un certain sens choquant et scandaleux, mais révélateur de la manière dont les interrelations entre le football, le capitalisme et la géopolitique s'articulent dans l'histoire globale des XXe et XXIe siècles.

 

Ce constat est corroboré par les mesures inédites annoncées par Infantino dès les premières années de son mandat : la Coupe du monde 2026 se tiendra dans trois pays, couvrant un continent entier, avec pour capitaine les États-Unis - serait-ce un contrepoids à l'armistice du FIFAgate perpétré par le FBI ? -, avec un tiers de participants en plus, leur nombre passant de 32 à 48. 

 

Au-delà des facteurs externes abordés dans ce court texte, le récit sur le terrain de la Coupe du Monde du Qatar met en évidence la continuité de l'hégémonie technique entre les équipes européennes et sud-américaines, l'Argentine remportant son troisième titre, près de 30 ans après les exploits de Maradona au Mexique (1986) et la consécration d'une persona antipodique, mais s’inscrivant dans la lignée des idolâtries porteñas, lors de sa probable dernière Coupe du Monde : Lionel Messi. Le signifiant sportif se joue également dans l’élaboration d’un récit qui donne place à l'inattendu et à l'extraordinaire, avec des équipes nationales capables, à chaque édition, de séduire et de surprendre. C'est le cas du Maroc en 2022 : la première équipe africaine à atteindre une demi-finale a ainsi activé tout un imaginaire social, à travers sa condition de pays arabo-méditerranéen oscillant entre l'Afrique et l'Europe.

 

Plus que le titre de l'Argentine, le souvenir de millions de téléspectateurs restera celui de l'une des finales les plus électrisantes des 22 Coupes du monde. On peut même évoquer le drame du "miracle de Berne", la victoire de l'Allemagne 3 à 2 face à la Hongrie en 1954, en regardant le match entre la France et l'Argentine, dont l’issue s’est jouée aux tirs au but, après un match intense aussi bien pour les amateurs de football que pour les indifférents, qui ne regardent un match de football que tous les quatre ans.

 

Et la nave va... en Amérique du Nord. Jusqu'en 2026.  

 

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Références bibliographiques

ARCHAMBAULT, Fabien. « Le continent du football ». In : Cahiers des Amériques latines. Paris : IHEAL Éditions, 2014, n. 74, p. 1-17.

ASTRUC, Clément. Le football, ambassadeur du Brésil ? Une projection international par le sport (1945-1974). Paris : Thèse de doctorat/IHEAL – Nouvelle Sorbonne/Paris III, 2022.

BROMBERGER, Christian ; DIETSCHY, Paul. « La Coupe du monde du Moyen-Orient ? ». In : Revue Football(s) : Histoire, culture, économie et société. Presses universitaires de Franche-Comté, 2022.

BURLAMAQUI, Luiz Guilherme. The making of a global FIFA: cold war politics and the rise of João Havelange presidency, 1950-1974. Berlin: De Gruyter, 2022.

COMPAGNON, Olivier. L’adieu à l’Europe. Paris: Fayard, 2013.

RAMONET, Ignacio. « Un fait social total ». In : Le Monde Diplomatique : Manière de voir 39 – Football et passions politiques. Paris : bimestriel mai-juin 1998, p. 6-7.

VONNARD, Philippe. L’Europe dans le monde du football : genèse et formation de l’UEFA (1930-1960). Bruxelles: Peter Lang, 2018. 

 


**português**

 


 

E la nave va?

Catar 2022, um novo capítulo da geopolítica das Copas do Mundo

 

Quando esta newsletter for publicada, em princípios de 2023, grande parte das atenções da opinião pública terá arrefecido seu interesse pela Copa do Mundo do Catar. Qualquer que seja o resultado em campo, outras pautas, supostamente mais “nobres” e importantes que uma competição de futebol, tais como economia, política, guerra, terão capturado as atenções do noticiário internacional. Esta é, aliás, uma característica do “presentismo” e da dinâmica midiática no século XXI: a vivência intensa e concentrada de um fenômeno, rapidamente sucedido por outro, que lega o anterior ao ostracismo e ao esquecimento.

 

Não obstante, o interregno de um mês do torneio internacional da FIFA, realizado em período excepcional, durante o inverno europeu, em finais de 2022, em virtude da geografia e do clima do país-sede, o minúsculo e desértico enclave do Golfo Pérsico, tem a capacidade cíclica de reativar o imaginário concorrencial por meio do nacionalismo esportivo. À maneira das antigas Exposições universais, tal torneio faz revivescer o desfile e o concurso simbólico das nações em pleno século XXI. Estas, como se sabe, reinventaram os esportes modernos na virada para o século XX, graças ao advento dos Jogos Olímpicos de 1896, concebidos pelo Comitê Olímpico Internacional e pelo aristocrático Barão Pierre de Coubertin. Durante o entreguerras, ao final dos anos 1920, as Olimpíadas deram origem a uma dissidência que engendraria, por sua vez, as Copas do Mundo de futebol.

 

O invento revela-se progressivamente bem-sucedido, sendo organizado pela FIFA, outra agência francófona, encarnada na figura de Jules Rimet, personagem capital deste cenário na primeira década do século XX. A competição é moldada em meio às controvérsias do cisma amadorismo-profissionalismo, em fins dos anos 1920 e início da década de 1930. Os gestores do futebol aderem à vertente profissional, enquanto as modalidades atléticas do olimpismo mantêm-se aferradas ao etos amador. Tal contraponto fixa-se no próprio calendário esportivo do pós-Segunda Guerra, com a cristalização da periodicidade de quatro anos e a alternância entre as Olimpíadas do COI e os Mundiais da FIFA. As duas instituições, também é consabido, acantonam-se na Suíça, em busca de refúgio às vicissitudes bélico-políticas das grandes potências e de certa proteção na gestão de suas finanças, cujo crescimento se exponencia dos anos 1970 em diante.

 

A maior porosidade do futebol às injunções do capital na mediação, na regulação e na organização de um evento de porte internacional não deixa de produzir exceções interessantes do ponto de vista da lógica do capitalismo. Afinal, a pátria capitalista emergente por excelência do século XX, os Estados Unidos, após duas participações pontuais nos torneios da FIFA, em 1930 e 1950, não produziu uma sociedade interessada nesse esporte nem uma equipe com qualidade capaz de se destacar, afora um ou outro imigrante, como o futebolista semiprofissional, de origem haitiana, Joe Gaetgens.

 

Os EUA só reaparecem no cenário geopolítico do torneio nos anos 1990, com influência suficiente para avocar a si a responsabilidade da realização de uma Copa. Entram em cena de forma tardia com o objetivo de alterar o tradicional eixo gravitacional do futebol – a díade Europa/América do Sul. Com efeito, tencionavam popularizar o soccer em seu país, mesmo que sob a improvisação de estádios de beisebol e de futebol americano para o Mundial de 1994.

 

Outra sorte de exceção na linguagem e na prática do nacionalismo futebolístico, gerido pela francófona FIFA, foi o distanciamento político da Grã-Bretanha, berço da modernidade esportiva desde o século XIX. Sua ausência inicial só foi reconciliada em meados da década de 1950, com a eleição de Stanley Rous, ex-juiz inglês, à testa da FIFA, perdurando no poder até os idos de 1970. Assim, se as Olimpíadas refletem o mundo bipolar e dramatizam em plena Guerra Fria a concorrência por medalhas entre americanos e soviéticos, a clivagem das Copas do Mundo reside antes na rotatividade de conquistas alternadas entre europeus e sul-americanos.

 

Mesmo em termos de controle institucional, a dinâmica de representação continental gera diferenças entre os dois lados do Atlântico. De um lado a Conmebol, representação do futebol na América do Sul criada já nos anos 1910 para a realização de seu Campeonato Sul-Americano; de outro, a UEFA, cujo surgimento remonta ao decênio de 1950, permitindo ao continente europeu o início da estruturação de campeonatos de clubes e de nações, processo histórico reconstituído em fontes primárias por investigação densa e original do historiador suíço Philippe Vonnard (2018).

 

O tabuleiro do poder esportivo é colocado de ponta-cabeça em meados dos anos 1970, quando um dirigente brasileiro, João Havelange, articula pela primeira vez uma candidatura não eurocêntrica à sucessão da presidência da entidade. Amparado nos votos dos países representantes da Ásia, África e Américas, após todo um trabalho de diplomacia esportiva, o então presidente da CBD – acrônimo para Confederação Brasileira de Desportos – vence as eleições na FIFA e destrona a hegemonia anglo-saxã de Rous e a gaulesa de Rimet.

 

Embora muito se fale na inflexão capitalista da Federação desde então, o contexto anterior, que criou as condições para tais mudanças e que levou à vitória de Havelange, foi analisado com argúcia por dois jovens pesquisadores. Um deles é o historiador brasileiro Luiz Burlamaqui, em tese defendida na USP, publicada em livro com versões em português e inglês (2022), que se debruça sobre a eleição como “ponto de chegada” mais do que como “ponto de partida” da “Era Havelange”.

 

Outro trabalho de fôlego é de autoria do pesquisador Clément Astruc (doutor em História/IHEAL, 2022), que explora com originalidade a difusão da imagem do futebol brasileiro no pós-Segunda Guerra, não apenas circunscrita à performance vitoriosa da Seleção nas Copas (1958, 1962 e 1970), mas também em função das excursões dos clubes de Pelé e Garrincha – Santos e Botafogo respectivamente – circulação que conecta uma série de relações diplomáticas da política externa brasileira nos anos 1960 e 1970, cujo capital político vai ser muito bem aproveitado por Havelange na sua guinada à presidência.

 

O ciclo presidencial deste personagem estende-se de 1974 a 1998 e assiste a um fortalecimento monopolístico e a uma expansão vertiginosa da entidade. De modo um tanto paradoxal, é Havelange, o representante “terceiro-mundista”, quem mais aprofunda a conversão da Copa em espetáculo comercial e em produto mercantil, apropriado pelas empresas de televisão e pelas corporações de patrocinadores.

 

Ao término de seu mandato, o agigantamento institucional contempla o ditado segundo o qual a FIFA possui mais países afiliados que a ONU. As dezesseis equipes participantes desde 1930 passam, em 1982, para 24 e, em 1998, para 32 países participantes, de modo a converter o evento esportivo em um espetáculo ainda representativo dos diversos quadrantes do globo.

 

Em síntese, outro “legado” da “Era Havelange” – e aqui nos aproximamos do caso do Catar 2022 – é o fim do revezamento entre a Europa ocidental e a América do Sul na hospedagem da Copa. Embora, por suposto, não se possa atribuir à vontade de um agente exclusivo um processo cujos fundamentos são sistêmicos e estruturais, tal dirigente encarnou o espírito expansionista da entidade. O brasileiro deixa a Federação apenas em 1998, após quase duas décadas e meia à sua frente, já com a decisão tomada da realização da Copa seguinte em um país do Oriente. Tal edição vai ser afinal dividida entre duas candidaturas, algo inédito na organização do torneio, dada a mobilização nacional acionada pelos dois países envolvidos: o Japão e a Coréia do Sul.

 

Havelange deixa o poder, acirra seu etos mercantil e ainda elege seu sucessor, o secretário-geral da FIFA, Joseph Blatter, ex-jogador do minúsculo time suíço Neuchâtel Xamax. Nos últimos vinte anos (2002-2022) intensifica-se a sua agenda expansionista, com a missão de alargar latitudes e de atingir novas fronteiras geográficas atrativas para os interesses financeiros desta governing body.

 

Isto se concretiza com a realização de uma Copa na Ásia (2002) e outra na África (2010). Passa ademais pela aposta nas nações emergentes dos BRICS (Brasil, Rússia, Índia, China e Rússia) que, na primeira década do século XXI, apresentavam condições político-econômicas atraentes e rentáveis para hospedar um Mundial. Era agora necessário um país cujo Estado tivesse capacidade financeira para a edificação a um só tempo de uma infraestrutura com equipamentos esportivos, urbanos e turísticos.

 

Não obstante, nesse entretempo, em meados de 2010, assistimos a reveses no projeto de monopólio de poder, que extravasa as tensões internas de poder e adquire dimensão pública. Trata-se da reação do mundo anglo-saxão, com o desencadeamento do FIFAgate, um processo investigativo coordenado pelo FBI estadunidense. Nele, são trazidos à tona escândalos de corrupção, de compra de votos e de transações obscuras de agentes do meio – presidentes de confederações, empresas patrocinadoras etc. –, o que inclui a escolha do Catar como país-sede da Copa.

 

A intensidade das acusações gera danos conjunturais. A dupla Blatter-Jérôme Valcke, respectivamente presidente e secretário-geral, é destituída da cúpula da FIFA, dirigentes de confederações e proprietários de marcas esportivas são presos ou investigados. As averiguações[1] provocam certo abalo no poder do futebol, ainda que não a ponto de comprometer sua estrutura, já que o italiano Gianni Infantino é conduzido à testa da FIFA, mantendo seu caráter eurocêntrico de dominação e de aprofundamento do projeto de expansão.

 

Todas as suspeições na escolha do Catar não são suficientes para a revisão da decisão pelo novo mandatário. Trata-se de um país tão pequeno quanto a ilha caribenha da Jamaica, com dois milhões de residentes, dos quais apenas trezentos mil são cidadãos, sendo os demais imigrantes, relegados ao trabalho subalterno. O território enquista-se entre duas nações fortes em termos geopolíticos: a Arábia Saudita e o Irã. O tamanho diminuto não compromete no entanto sua condição de superpotência econômica, uma vez que se trata de um dos principais produtores de gás natural liquefeito do mundo, estratégico, portanto, em tempos de crise energética aguçada pela guerra russa na Ucrânia.

Nos últimos vinte anos, a riqueza multibilionária derivada dos recursos naturais levou o governo do Catar a transformar Doha em uma capital cultural e uma vitrine para um luxo tão ostensivo como artificial.

 

Explica-se assim, pois, por que um país carente de qualquer tradição esportiva – diferente, por exemplo, do tradicional fervor turco pelo futebol –, conforme demonstra o desempenho pífio da equipe do Catar nos três jogos da primeira fase da Copa de 2022, tem todo o dinheiro petrolífero para erguer oito super arenas ultra tecnológicas e “modernas”. A realização do Mundial no Oriente Médio foi feita à custa da exploração aviltante de trabalho migratório internacional e de artifícios predatórios financeiros que configuram aberrações climáticas, a exemplo da inédita experiência de climatização do interior dos estádios.

 

Em contrapartida, tentativas pontuais de boicote por parte de torcedores organizados, de movimentos sociais e de determinadas federações de futebol na Europa, emulados pelas reportagens da imprensa e pelas denúncias da opinião pública, não foram capazes de demover o projeto concentrador de capital da FIFA, agora com Infantino no comando.

 

Tendo em vista, pois, a longa duração de um torneio prestes a completar cem anos de existência – conseguirão o Uruguai e a Argentina sensibilizar a ganância da FIFA e realizar em 2030 o sonhado novo Mundial no Cone Sul, em comemoração ao centenário do evento em 1930, ao bicentenário de independência do país oriental platino e ao reconhecimento da conquista do tricampeonato argentino em 2022? – o Catar é tão somente mais um capítulo, em muitos aspectos acintoso e ultrajante, mas revelador dos modos pelos quais se articulam na história global dos século XX e XXI as inter-relações entre futebol, capitalismo e geopolítica.

 

Tal situação é corroborada pelo ineditismo das medidas anunciadas por Infantino em seus primeiros anos de gestão: a Copa de 2026 em três países, a cobrir todo um continente, capitaneada pelos EUA – seria uma contraprestação ao armistício do FIFAgate perpetrado pelo FBI? –, com mais um terço de participantes, saltando de 32 para 48 países selecionados.

 

Afora as injunções externas de que nos ocupamos nesse breve texto, a narrativa em campo do Mundial do Catar aponta para a continuidade da hegemonia técnica entre os selecionados europeus e sul-americanos, com a conquista argentina de seu tricampeonato, quase trinta anos após os feitos de Maradona no México (1986) e a consagração de uma persona antípoda, mas sucessora, na linhagem das idolatrias portenhas em sua provável última Copa: Lionel Messi. O significado esportivo lega ainda o caráter narrativo em torno do imprevisto e do extraordinário, com os selecionados nacionais capazes, a cada edição, de seduzir e de surpreender. Tal foi o caso do Marrocos em 2022 – a primeira equipe africana a alcançar uma semifinal –, com a capacidade subjacente de ativar todo um imaginário social, mediante a condição de país árabe-mediterrâneo a oscilar entre a África e a Europa.

 

Mais que o título da Argentina, ficará na memória daqueles bilhões  de telespectadores o acompanhamento de uma das partidas finais mais eletrizantes entre os vinte e dois Mundiais já ocorridos. Pode-se até evocar o drama do “milagre de Berna”, Alemanha 3 x 2 Hungria em 1954, ao se assistir à disputa entre França e Argentina, decidida nos pênaltis, após uma partida intensa e envolvente para os amantes do futebol, e mesmo para os indiferentes, que apenas de quatro e quatro anos assistem a um jogo de futebol.

 

Y la nave va...para a América do Norte. Até 2026!

   

Referências consultadas

ARCHAMBAULT Fabien, 2014, « Le continent du football », Cahiers des Amériques latines, n. 74, p. 1-17.

ASTRUC Clément, 2022, Le football, ambassadeur du Brésil ? Une projection internationale par le sport (1945-1974), Paris, Thèse de doctorat/IHEAL – université Sorbonne Nouvelle.

BROMBERGER Christian, DIETSCHY Paul, 2022, « La Coupe du monde du Moyen-Orient ? », Revue Football(s) : Histoire, culture, économie et société, n. 1, p. 17-26, Presses universitaires de Franche-Comté.

BURLAMAQUI Luiz Guilherme, 2022, The making of a global FIFA: cold war politics and the rise of João Havelange presidency, 1950-1974, Berlin, De Gruyter.

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[1] Uma das versões atribui uma suposta retaliação da Inglaterra e dos Estados Unidos à recusa da entidade para que sediassem as Copas de 2014 e 2022.

 


IHEAL-CREDA 2023 - Publié le 16 janvier 2023 - La Lettre de l'IHEAL-CREDA n°72, janvier 2023.

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